La forteresse volante (5 janvier 1944)
Le texte qui suit est un extrait de l'ouvrage "La résistance en lutte dans la région de Maël-Carhaix-Callac, 1940-1944" édité en 1984. L'auteur de ce passage est le Lieutenant F.T.P.F. "Pierrot".
Presque chaque nuit, des vagues de bombardiers survolaient notre région et l'on entendait les déflagrations des bombes, les salves de la Flack allemande et on voyait, vers le sud, en direction de Lorient, le ciel s'enflammer de lueurs d'incendies. La chasse ennemie intervenait et mitraillait les avions alliés. Le nombre des pilotes de la R.A.F. abattus sur nos campagnes augmentait de jour en jour...
Le 5 janvier 1944, une forteresse volante américaine, gravement endommagée par la Flack allemande, au retour d'un bombardement de la base aérienne de Bordeaux-Mérignac (nous le saurons plus tard par les Américains eux-mêmes, l'un d'entre eux, le Lieutenant Ernest HUGONNET, parlait français) survolait, à basse altitude, la commune de Maël-Carhiax.
Le bombardier était harcelé par deux avions de chasse allemands qui le mitraillaient de tous côtés, finissant par l'abattre. La forteresse s'écrase en flammes à la limite de Maël-Carhaix [NDR : et de Kergrist-Moëlou], en pleine campagne, au lieu-dit "Petit Paris". Nous nous rendons immédiatement à bicyclette vers le point de chute de l'appareil, distant de 3 à 4 km de Maël-Carhaix. Avant que l'appareil, touché à mort, ne s'écrase au sol, les aviateurs valides ont sauté en parachute et se sont dispersés dans la nature. Malheureusement, un membre de l'équipage, Arlie LEROY THOMSON, trouve la mort, son parachute ne s'étant pas ouvert. L'empennage arrière de la forteresse a été déchiqueté par le mitraillage de la chasse allemande. Le mitrailleur arrière a été tué à son poste de combat. De la carlingue, que le feu menace de gagner, nous avons mille difficultés pour extraire le corps d'un aviateur criblé de balles. Il faut faire vite. L'appareil risque d'exploser et les Allemands, alertés, ne vont pas tarder à venir. Nous nous sauvons.
Bientôt, la police allemande est sur les lieux avec des chiens... Ils s'élancent dans toutes les directions à la poursuite des parachutistes alliées, en vain. Les Allemands abandonnent leurs recherches à la tombée de la nuit.
Nous en profitons pour retourner sur les lieux dans l'espoir de récupérer le matériel utilisable. Nous trouvons un poste émetteur intact, l'incendie n'ayant pas atteint cette partie de l'avion. Nous l'emportons à Maël. Hélas, faute de source d'alimentation..., cet appareil ne nous sera d'aucune utilité.
Le lendemain 6 janvier et les jours suivants, de jour comme de nuit, les patrouilles allemandes sillonnent la région. La Gestapo, le Service de Sécurité, la troupe allemande cantonnée à Maël-Carhaix, ratissent la campagne, fouillent partout sans succès. Les aviateurs alliées sont introuvables... Ils ont été recueillis par un cultivateur du village de "Quinquisaliou" à 2 km de point de chute du bombardier. Le cultivateur a camouflé trois des aviateurs dans une crèche à cochons, derrière une cloison aménagée à cet effet. La cachette est excellente. En ouvrant la porte de la soue, on ne voit que les bêtes; on ne peut soupçonner la présence des aviateurs américains : les grognements des porcs couvrent les bruits qu'ils pourraient faire...
Note groupe est prévenu. Nous arrivons de nuit pour prendre en charge nos trois rescapés... Nous les conduisons à Trébrivan où le secrétaire de mairie leur procure un refuge. Mais le plus dur reste à faire. Il faut absolument soustraire nos aviateurs aux recherches allemandes et les conduire au plus vite à Gourin. Trouver un véhicule n'est pas le plus difficile, ce sera celui du transporteur local. Mais nous manquons d'essence. Nous faisons appel au directeur des ardoisières du Moulin de la Lande à Maël-Carhiax, qui nous en fournit gratuitement. Et c'est de nuit, par des chemins de campagne peu fréquentés, que nous réussissons à conduire nos trois aviateurs à Gourin, sans encombre..."
Quelques jours plus tard, deux autres aviateurs nous sont confiés par le groupe de résistants de Locarn. Ils seront dirigés le même jour par le petit car de Trébrivan, comme de simples passagers civils, vers Gourin à la barbe des occupants...Les jours suivants, nous recevons un coup de téléphone. Il y a un "colis" à enlever d'urgence chez le bijoutier de Rostrenen. C'est un aviateur américain, nommé SOUTHERS, blessé au bras par balle. Il est conduit d'abord à Maël-Carhaix où le Docteur THOMAS lui donne les premiers soins. Aussitôt après, pour profiter de la nuit, notre aviateur nous suit à bicyclette... Nous empruntons cette fois la route de Gourin par Paule et Tréogan... Brusquement, à Saint-Jean, sur les pentes du Mont Noir où se trouve le poste d'observation ennemi, nous nous trouvons en face de deux soldats allemands casqués et armés. Ils nous regardent. Nous avons ralenti. Contre toute attente, nous n'entendons pas le "Halt" fatidique... Nous continuons de pédaler sans un mot... Bientôt nous arrivons en vue du carrefour de la route de Gourin et de Carhaix, quant nous voyons la lueur des phares d'une voiture qui vient vers nous. D'instinct, nous plongeons dans le fossé avec nos bicyclettes que nous laissons tomber... En hâte, nous nous dissimulons sous les taillis... La voiture s'approche. Elle nous double sans ralentir. Les Allemands n'ont rien vu malgré le beau clair de lune. Nous attendons que la voiture s'éloigne suffisamment et nous reprenons nos bicyclettes.
Vers le 15 janvier, nous récupérons un septième aviateur américain au village de Kerprigent en Locarn, Ralp HALL... Nous avons bien du mal à lui trouver des vêtements civils à sa taille. Quant aux chaussures, impossible de lui trouver une paire à sa pointure. Alors, faute de mieux, on le chausse de sabots de bois... Ce ne sera pas facile pour lui de pédaler avec ses gros sabots ! Et nous voilà en route de Maël-Carhaix vers Paule, Tréogan et Gourin.
Sept aviateurs ont été secourus et confiés au réseau "Turma Vengeance" en janvier 1944 à l'époque cruciale de la guerre où la perte d'un pilote pour les Alliées était plus grave que la perte d'un avion.... Ces aviateurs, tombés à Kergrist-Moëlou, regagnèrent l'Angleterre. Pris en charge par le réseau "Shelburne", ils embarquèrent de la plage Bonaparte (Plouha) le 27 février 1944.
Source : La résistance en lutte dans la région de Maël-Carhaix-Callac, 1940-1944 édité en 1984. L'auteur de ce passage est le Lieutenant F.T.P.F. "Pierrot", http://francecrashes39-45.net/page_fiche_av.php?id=2861, http://www.americanairmuseum.com/
,https://www.youtube.com/watch?v=0hla9h3tR_c
Voir
également sur ce site, Le voyage souvenir d'Euphémia BLYE (22
avril 2013) Lire...
Autres sujets :
La seconde compagnie du Bataillon Koënig :
Roque Carrion est un officier espagnol notamment connu pour ses actions de résistance en France. En 1936, il est officier de l'armée de l'air espagnole. Il se réfugie en France en 1939 après la défaite de la République en Espagne et est interné dans différents camps du sud de la France. Embauché sur le chantier de construction de la base de sous-marins de Lorient, il y développe un réseau de sabotage. Contraint à la fuite, il rejoint le maquis de Ty Glas à Plouray. Son pseudonyme est Icare.
En juin 1944, la 2ème Compagnie FTP Bataillon Koënig du Commandant Icare s'installe dans les Bois de Kergrist-Moëlou pendant 3 semaines.
Le 14 juillet 1944, elle défile dans le bourg de Kergrist-Moëlou, alors que les Allemands se trouvent toujours près de là, à Rostrenen. Ce bataillon FTP, devenu 1ème Bataillon FFI du Morbihan commandé par Icare, libère Rostrenen et Pontivy.
Roque Carrion meurt en 1995 et est inhumé à Lanester.
Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Roque_Carrion
Ils
ont fait le sacrifice de leur vie :
Au cours de la Seconde Guerre Mondiale, 8 kergristois payèrent de leur vie la libération de la France. Voici leurs noms tels qu'ils figurent sur le monument aux morts de la commune : BERNARD Joseph, FOUILHOU Albert, LE BOËDEC Yves, LE CLOAREC Marcel, LE GAC Louis, MELSCOËT Louis, MOUDIC Louis, THORAVAL Auguste.
Conflits en Afrique du Nord : BERNARD Mathurin (né le 28 novembre 1929, décédé le 5 novembre 1956 au Maroc)
Saint-Yves (13ème siècle) :
Saint-Yves, de son vrai nom Yves HELORY, naquit à Minihy-Tréguier (Côtes d'Armor) au Manoir de Kermartin le 13 octobre 1253 (mort le 19 mai 1303, canonisé le 19 mai 1347 par le Pape Clément VI)...
Les Ligueurs (16ème siècle) :
Lorsque le roi Louis XII signa en 1499 le traité d'union entre la Bretagne et la France la veille de son mariage avec Anne de Bretagne, le peuple armoricain, fatigué d'une longue guerre, consentit à accepter le roi pour seigneur...
Le Père Maunoir (1606-1683) :
Julien MAUNOIR (An Tad Mad, "Le Bon Père") est né en 1606 près de Fougères. Nommé professeur au Collège des jésuites de Quimper en 1630, il fréquentait souvent la Chapelle de Ti Mamm Doué ("La maison de la Mère de Dieu") proche de la ville...
Le Papier timbré (17ème siècle) :
Déjà pressurés par Colbert, Ministre du Roi Louis XIV et confrontés à la chute des cours des produits agricoles, les bretons se voient imposer en 1675 le payement du Papier Timbré, le monopole des tabacs et la taxe sur la vaisselle d'étain...
Terrible Guerre 14-18 :
Au cours de la Première Guerre Mondiale, 116 hommes de Kergrist-Moëlou (plus de 10% de la population !) périrent sur les champs de batailles ou des suites des combats. La commune, comme toutes les communes de Bretagne, paya ainsi un très lourd tribut à l'effort de guerre français...
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